03 Avr Les seniors face au numérique : voulez-vous surfer, grand-mère ?
Article publié par Louis-Charles Rostand le 3 avril 2015 dans Clubic.com
Il y a encore quelques années, la société considérait une personne âgée de plus de 50 ans comme un « senior ». Mais avec les progrès de la médecine et l’allongement de la durée de vie, cette frontière a été repoussée au-delà des 70 ans. Une population vieillissante, qui n’en est pas moins très active et désireuse de rester connectée avec le monde environnant.
Selon une étude publiée par le Crédoc en juin 2013, le nombre de seniors âgés de plus de 60 ans représente 23% de la population ; ils seront plus d’un tiers en 2060. En janvier 2008, le Crédoc indiquait que le nombre de seniors de 60 à 69 ans connectés à Internet était de l’ordre de 40 % environ, et de seulement 11 % pour les plus de 70 ans, mais en constante progression dans les deux cas. La Délégation aux Usages de l’Internet a publié un livre Blanc intitulé « Seniors et tablettes interactives » qui met en lumière quatre types de réticences des seniors par rapport aux technologies numériques. Premier obstacle pour près de 44%, la complexité des ordinateurs. Second frein, les seniors ne sont pas convaincus que les services de l’internet peuvent répondre à leurs besoins quotidiens (30%). Vient ensuite la question de sécurité des transactions et de la protection des données personnelles (14%), et enfin 12% des seniors sont arrêtés par le coût d’acquisition de ce type de technologie.
En élargissant un peu la cible, nous découvrons que les plus de 50 ans représentaient en 2011 un tiers de la population française. À l’horizon 2030, c’est un Français sur deux qui aura plus de 50 ans. Aujourd’hui 10,5 millions d’internautes français ont plus de 50 ans, et 69% des 50 ans et plus possèdent un ordinateur portable ou un autre appareil connecté, selon une étude SIMM Kantar Media datant de 2012.
Connectivité (ré)active
Au regard de tous ces chiffres, il apparaît déjà que pour les plus de 70 ans, la « fracture numérique » est peut-être une réalité. Si les 60-70 ans semblent moins rétifs à cet univers, c’est d’abord par obligation, leurs enfants et petits-enfants baignant à longueur de journée dans les réseaux sociaux, échanges de photos et messages électroniques. Dès lors les grands-parents doivent « se mettre à la page » pour suivre le rythme et garder le contact. C’est ainsi que bien souvent, ils découvrent dans le même temps les vertus du monde 2.0, dans lequel ils s’installent rapidement jusqu’à trouver leurs propres marques.
(R)évolution active
Un ordinateur de bureau était un curieux animal pour un senior du début du siècle. Du clavier pas toujours simple à appréhender, en passant par le curseur de la souris qu’il faut dompter et comprendre, sans oublier les dizaines de câbles qui sortent de partout pour brancher le son, l’image, l’impression et autres périphériques, il n’était pas toujours facile de s’y retrouver. Sans parler des mises à jour qu’il convenait de faire manuellement, des histoires de conflits de version, d’OS, de logiciels ou de navigateurs, et bien sûr des bugs et autres virus qui venaient un peu plus noircir le tableau. Non. L’ordinateur ne semblait pas pensé et conçu pour des néophytes, encore moins lorsqu’ils étaient totalement ignorants de la chose informatique.
Mais avec les ordinateurs portables, un pas a été franchi : plus (ou peu) de câble, un système opérationnel tout de suite, de nombreux périphériques ou logiciels embarqués (webcam, messagerie, clavier, souris via touchpad). L’outil semblait un peu plus adapté à la cible senior qui allait d’ailleurs plébisciter le concept, s’ouvrant petit à petit à cette « nouvelle forme de communication », plus virtuelle mais devenue norme.
Cependant, c’est véritablement avec l’avènement de la tablette que les seniors sont parvenus à apprivoiser toute cette nouvelle technologie, rendue plus participative, active et attractive grâce au tactile, interface plus intuitive puisqu’il suffit de poser le doigt sur une icône pour ouvrir le logiciel caché derrière et l’utiliser. Le tactile a rendu les choses plus faciles, adaptables et praticables. Il n’y a plus besoin de chercher une icône dans une forêt de symboles, de promener sa souris indéfiniment sur l’écran ou de quitter l’écran des yeux à chaque fois qu’il faut taper une touche du clavier.
(Re)naissance numérique
Face à ce nouveau boom générationnel, qui permet à ceux qui ont vu naître l’informatique moderne sans s’y intéresser vraiment de revenir dans la course, de nombreux constructeurs ont saisi la balle au bond, conscients du marché gigantesque représenté par les seniors, population qui pourrait devenir majoritaire dans certains pays d’ici quelques années ! Par ailleurs, certains profitent d’un réel « pouvoir d’achat », ce qui ne fait que renforcer la gourmandise des entreprises.
Dès lors rien n’est trop beau pour leur plaire et les amener progressivement à utiliser une tablette ou un smartphone proposant des outils et une interface adaptés à leurs besoins : « La simplicité reste un des éléments les plus importants pour lever les freins d’accès aux nouvelles technologies » expliquent Christophe Boscher et Thierry Corbillé, présidents et cofondateurs de Tikeasy. « Il est important de proposer des solutions adaptées aux seniors en se focalisant sur les applications essentielles et en simplifiant les bijoux de technologies destinés aux plus jeunes. Ainsi, l’accès aux messages sous toutes leurs formes, leur lecture facilitée (gros caractères, lecture en synthèse vocale), les outils simples pour répondre (texte, vocal, vidéo, …), etc… sont autant d’atouts pour initier nos aînés. »
Parmi les constructeurs engagés dans les opérations de séduction à l’égard des seniors, nous retrouvons Tikeasy et sa tablette TOOTI Family conçue et pensée pour offrir une expérience complète (multimédia, Internet, réseaux sociaux), tout en restant la plus accessible possible. Même combat chez Emporia ou Doro qui proposent eux-aussi des appareils (smartphones, tablettes) spécialement développés pour les seniors avec une ergonomie adaptée : grosses touches, volume sonore renforcé, fonctionnalités réduites à l’essentiel, et même, bouton d’appel d’urgence qui permet de contacter un ou plusieurs proches, voire un service médical, d’une simple pression !
Génération Baby-boomers
Les seniors d’aujourd’hui sont de moins en moins décalés ou perdus face à l’univers numérique, d’autant que les outils et les sites spécialisés à leur disposition sont de plus en plus nombreux. Les technologies cybernétiques (téléphones portables avec Internet intégré, tablettes numériques de plus en plus accessibles, etc.) constituent des outils de communication essentiels afin de rester en lien avec son entourage privé et professionnel. Il semblerait que les seniors, en termes de pratique Internet, aient à peu près les mêmes habitudes que les internautes lambda, notamment grâce à une plus grande exploitation des réseaux sociaux, ce qui ouvre ainsi une voie royale à la communication intergénérationnelle ! Bref, les seniors ne sont plus les oubliés du numérique, et il n’est pas impossible qu’ils puissent un jour faire jeu égal avec leurs cadets… ce qui sera forcément une réalité dans un avenir plus ou moins proche, puisque les générations Y/Z, pour qui Internet et les nouvelles technologies font partie du paysage depuis toujours, rejoindront le camp des seniors un jour ou l’autre.